Samedi 23 octobre à Toulouse, l’ACER a participé à l’hommage rendu à l’Espagne Républicaine et à ses combattants.
Un hommage organisé à l’initiative du PCF de la Haute Garonne, en partenariat avec la librairie de «la Renaissance».
Cette journée d’hommage consacrée à la mémoire historique a été rythmée par trois rendez-vous :
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Une table ronde le matin sur le thème des combats communs des communistes français et espa gnols pour la liberté. Au cours de cette table ronde plusieurs participants sont intervenus : Jean ORTIZ, historien, Maître de Conférences l’Université de Pau, Ginés FERNANDEZ, directeur de Mundo Obrero, Ramon FRANQUESA, membre du secrétariat du PSUC et Jean-Paul CHANTEREAU pour l’ACER, qui a rappelé le contexte historique et les raisons de la création de l’AVER (Association des Volontaires en Espagne Républicaine) pendant la guerre d’Espagne et fait le lien avec, aujourd’hui, l’ACER et ses actions au service de la mémoire afin de préserver celle-ci et les valeurs pour lesquelles nos aînés ont combattu.
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Le dévoilement d’une plaque commémorative à 15H apposée sur le mur de l’hôpital Joseph DUCUING (ancien hôpital VARSOVIE) par le Député-maire de Toulouse Pierre COHEN, en présence de personnalités de la communauté espagnole de Toulouse.
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A 17H30, l’hommage s’est poursuivi, Quai de l’Exil républicain espagnol, sur les bords de la Garonne, par une soirée concert, musique et danse à laquelle un public nombreux a participé.
Cette initiative consacrée à l’Espagne républicaine et à ses combattants pour leur lutte contre la dictature franquiste et leur participation à la Résistance en France a permis de mobiliser et de rassembler à Toulouse un public nombreux sur le thème de la mémoire.
Ci-après, l’intervention prononcée au nom de l’ACER et une série de photos illustrant les rendez-vous de cette journée d’hommage à la République espagnole et à ses combattants.
Jean-Paul CHANTEREAU
Discours de l’ACER :
Chers amis et chers camarades,
C’est en pleine guerre d’Espagne que fut créée l’AVER (Amicale des volontaires français en Espagne républicaine) dont la mission première, à l’époque, était le recrutement d’autres volontaires et l’aide multiforme à apporter à toutes celles et à tous ceux qui combattaient le coup d’Etat de Franco et qui comptaient déjà parmi ses victimes.
Un peu plus de 9000 volontaires français s’engagèrent dans les BI. Un grand nombre de ces combattants de la démocratie faut-il le rappeler, se retrouvèrent après la Guerre d’Espagne dans les tout premiers rangs, les plus difficiles, de la Résistance : France-Libre et, plus encore, Résistance intérieure, en particulier, dans le Midi français, aquitain, toulousain, gard-lozérien, catalano-roussillonnais ou provençal. Et les anciens d’Espagne, revenus ou exilés ou repliés en France comptèrent parmi les pionniers, parmi les instructeurs expérimentés des premiers temps de la lutte armée, de la guérilla urbaine, des maquis.
Ce sont des guérilleros espagnols, ceux de la 35ème division Marcel LANGER, qui, entre autres, libérèrent Toulouse, eux qui dès avant Pétain et le désastre de 40, avaient été catalogués par la 3ème République moribonde, comme « étrangers indésirables ».
« Ces indésirables », seront parqués à leur retour d’Espagne et séjourneront dans les camps de bien triste mémoire du Vernet, de Gurs, de Septfonds, d’Argelès et dans des dizaines d’autres camps…
L’AVER, après la Libération poursuivit ses activités d’entre aide et de secours au service de ses adhérents rescapés de la guerre d’Espagne et de la Résistance et pour la reconnaissance de leur qualité d’anciens combattants. Le Colonel Henri Rol-Tanguy en fut le dernier Président.
C’est à la demande des derniers vétérans de la Guerre d’Espagne, des derniers adhérents de l’AVER, soucieux de « passer le témoin », comme on aime à le dire, que fut, en 1996, créée l’ACER (Les Amis des Combattants en Espagne Républicaine) qui, plus largement, se définit non comme un regroupement, stricto sensu, d’anciens combattants, mais comme le regroupement d’amis partageant les idéaux défendus de 1936 à 1939 en Espagne, par ces mêmes combattants et ceux qui les aidaient.
L’ACER perpétue aujourd’hui les idéaux, le souvenir et le sens de l’engagement de nos aînés. Elle œuvre donc depuis 14 ans à la fois pour la mémoire historique, l’internationalisme, l’antifascisme et la démocratie.
Grâce à la persévérance de nos aînés, anciens brigadistes et fils de brigadistes, Lise LONDON, le Colonel Louis BLESY, le Colonel Henri ROL-TANGUY, Jean-Claude LEFORT, José FORT, François ASENSI, et Pierre REBIERE et bien d’autres encore, l’ACER s’enorgueillit d’avoir obtenu pour les anciens inter-brigadistes français, la reconnaissance et la qualité d’Ancien Combattant en décembre 1996 (sous la présidence de Jacques CHIRAC).
Autre exemple des batailles livrées au service de la Mémoire : à Toulouse, l’ACER a été de ceux, parmi les premiers, à demander que la station de Métro St MICHEL, porte le nom de Marcel LANGER, ancien brigadiste et résistant, guillotiné en 1943 dans la prison de St MICHEL.
Nous avons encore, toujours à l’esprit, le ton méprisant du refus initial du maire de l’époque qui, « chapitré en haut lieu » pour sa maladresse, finit par consentir, non sans essayer de réduire à l’extrême discrétion la cérémonie de « baptême », qui dut, de ce fait, être recommencée plus dignement par l’équipe municipale suivante… et actuelle.
L’ACER soutient actuellement les efforts et les initiatives des démocrates espagnols qui ont entrepris dans les conditions que l’on sait aujourd’hui en Espagne le recensement et l’ouverture des charniers du franquisme (charniers où se trouvent également nombre d’inter-brigadistes assassinés sommairement et enfouis sur place).
Comment ne pas évoquer à cette occasion le formidable travail de nos amis de l’Association pour la Récupération de la Mémoire Historique (ARMH) présidée par Emilio Silva.
Lors des attaques dirigées contre le juge Baltazar GARZON (en vue de le déstabiliser et de le démettre de ses fonctions) l’ACER a tenu à s’adresser à lui, sous la signature de Lise LONDON et de Cécile ROL-TANGUY, co-présidentes afin de lui témoigner, de France, notre solidarité, notre estime et notre confiance dans l’action résolue qui était la sienne en vue de réhabiliter les victimes du franquisme et de rendre justice aux familles.
Naturellement, pour des raisons historiques notre association demeure toujours très sensible à l’action des démocrates espagnols et à toutes celles qui ont à cœur «le travail de mémoire », la justice et la réhabilitation des victimes du franquisme.
Cette sensibilité toute particulière, n’est pas l’apanage de l’ACER. Elle est partagée et portée avec nous par de nombreuses autres organisations mémorielles d’autres pays qui ont décidé (en réponse à notre appel …) de se regrouper dans le cadre d’une Coordination internationale, dont nous sommes, en partenariat avec nos amis allemands de KFSR, les artisans et dont les bases ont été posées à Paris en mai 2008.
Cette Coordination internationale a, depuis lors, été consolidée avec de nouvelles adhésions dans le cadre des initiatives organisées conjointement par KFSR et l’ACER à Paris et à Berlin.
C’est ainsi que, les 28, 29 et 30 mai dernier, à PARIS, près de 70 représentants de quinze pays*, d’anciens volontaires des BI pour certains, (Joseph EISENBAUER, Marin CHOUROV, Juan Miguel de MORA, Lise LONDON, Joseph et Vincent ALMUDEVER), venus d’Autriche de Bulgarie du Mexique et de France, nous ont honoré de leur présence chaleureuse et de leur participation à nos travaux.
Les discussions et les débats, à l’occasion de cette rencontre internationale à Paris, ont montré que l’antifascisme et l’internationalisme demeuraient un ciment unissant tous les participants.
C’est à partir de là, dans le cadre de cette Coordination internationale dont nous venons de jeter les bases, que le rassemblement de toutes celles et de tous ceux qui veulent perpétuer la mémoire de nos anciens va se construire pas à pas. « Pas une mémoire repliée sur le seul souvenir, mais une mémoire prenant appui sur le souvenir, pour les résistances d’aujourd’hui et les luttes de demain » comme l’a si bien dit José FORT, fils de brigadiste, coprésident de l’ACER.
Dans le cadre de cette démarche les associations membres de la Coordination internationale ont validé les propositions et objectifs suivants :
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participation en 2011 en Espagne aux commémorations du 75ème anniversaire de la création des Brigades internationales,
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mise en place d’un site internet,
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instauration de relations suivies avec des juristes et les organisations espagnoles travaillant sur la localisation des fosses communes en Espagne,
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création d’une cellule de « veille » afin de nous alerter sur toutes les résurgences fascistes notamment en Europe permettant une réaction rapide et coordonnée,
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organisation de rencontres, échanges, notamment de jeunes, accessibles au plus grand nombre, création d’un réseau d’Universités, lycées, chercheurs. Réalisation d’une brochure pédagogique en plusieurs langues portant sur les Brigades internationales avec la collaboration d’historiens de plusieurs pays.
Les idéaux que perpétuent l’ACER et ses partenaires, dans le cadre de la CI, sont ceux, communs de l’antifranquisme et de la Résistance française, ceux de la démocratie :
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de 1936 à 1939, 54 pays furent représentés dans les BI
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de 1939 à 1945, combien le furent à nouveau mobilisés volontairement contre les soutiens de Franco, contre Hitler et Mussolini ?
A l’heure où, en Europe et dans le monde, l’extrême droite et ses imitateurs régénèrent « la Bête », l’ACER et les associations sœurs de la Coordination internationale, ont à cœur de contribuer à faire toute la lumière sur un conflit majeur du siècle passé, sur une mobilisation populaire et internationale inédite, afin de mieux appréhender aujourd’hui les enjeux politiques et sociaux du présent et de l’avenir.
La guerre « oubliée » d’Espagne doit sortir de l’oubli…
Jean-Paul CHANTEREAU – ACER
Toulouse, le 23 octobre 2010.
*Allemagne, Angleterre, Autriche, Belgique, Bulgarie, Danemark, Espagne, Etats-Unis, France, Hollande, Italie, Irlande, Luxembourg, Mexique, Russie